vendredi 3 août 2007

Les pêcheurs se serrent la ceinture, les plaisanciers rajoutent des crans à la leur

Depuis une vingtaine d’années, la communauté scientifique se rend à l’évidence que les ressources de la mer sont bien épuisables si on ne les gère pas. Le postulat d’Hugo de Groot se voit mis KO et les règles juridiques qui en découlaient remises en question. Les poissons, les langoustes, les homards peuvent disparaître ? Oui, nous pouvons aujourd’hui concevoir de dire « adieu ! veaux, vaches, cochons » pour les hommes de la mer. A qui la faute ? Un coupable s’il vous plaît ! Mais d’abord, quelles sont les causes de tous ces effondrements de stocks successifs : morues, sardines, merlans, thons, langoustes… ? « Les pêcheurs professionnels !!» clament en chœur les scientifiques, les instances gouvernementales, les écologistes et la société civile. C’est tellement plus simple de faire porter le chapeau à une communauté réduite presque en voie disparition dont le beau métier ne fait plus rêver un jeune. Dans ce dossier, on ne parle pas des fabricants de détergeant, de pesticides, de produits chimiques en tout genre, de la société qui consomment plus de ces produits que de poissons. On ne parle pas de notre mode vie destructeur des ressources naturelles. On ne parle pas des agriculteurs qui traitent leurs cultures plus que de raison, on ne parle pas des ménagères qui lavent leur sol à la javel trois fois par semaine, des coiffeuses qui proposent des soins à la pelle à leurs clientes. On ne parle pas des centaines de milliers de plaisanciers qui se livrent à la pêche sans encadrement, ni limitation réglementaire et qui astiquent leur navire avec des produits chimiques. Cependant, la réglementation existe dans d’autres pays d’Europe : une quantité maximum de 5 kg par personne à bord est autorisée en Italie. Profitons de l’élaboration du livre vert sur lequel l’Union Européenne travaille pour prendre une décision commune et cohérente et régler ce problème de cohabitation et de pression sur la ressource ! Il est urgent de prendre en main cette cohabitation, l’explosion de la plaisance devrait elle seule sonner l’alarme des fonctionnaires en charge de la gestion des stocks et de l’aménagement du territoire (30 000 nouvelles immatriculations de plaisance ont eu lieu sur la Région corse contre 4 pour la pêche professionnelle…).

Non seulement les mesures de protection et de gestion des stocks halieutiques ne s’adressent pas à la société dans son ensemble (il ne faudrait pas heurter le douillet mode de vie de rêve de nous autres), mais ne s’inquiètent pas de voir la flambée du nombre des pêcheurs plaisanciers à la mer.

Depuis une vingtaine d’années, les pêcheurs professionnels doivent réduire leurs jours de mer, réduire la puissance de leur moteur, réduire leur consommation de carburant, réduire le nombre de filets, réduire leur nombre de casiers et d’hameçons à leurs palangres, réduire leurs captures. Mais ils doivent augmenter le temps passé à remplir des documents administratifs : demande de PME, fiches de capture, demande de PPS, livre de bord, rôle ENIM, allocations familiales… Les pêcheurs professionnels se serrent la ceinture toujours un peu plus au fur et à mesure que la plaisance prend du terrain. Doit-on comprendre que les pêcheurs professionnels restreignent leur activité au bénéfice de l’expansion de l’activité de plaisance ? Les Porsches peuvent-elles rouler à 200km/h lorsque les autres véhicules sont limités à 50km/h ?

Les professionnels sont heureux de voir un nouveau marché fleurir, les industries nautiques de plaisance ont le vent en poupe et c’est tant mieux. Seulement, les utilisateurs pêcheurs plaisanciers doivent aussi voir leur passe-temps soumis à une réglementation écrasante. La survie des écosystèmes marins est une question qui concerne l’humanité, chacun de nous. La leçon donnée aux pêcheurs professionnels provenant des groupements écologistes et gouvernementaux soutenus des industries polluantes, tout ce beau monde ne se préoccupe que de la survie de ses propres structures et non des pêcheurs ni des poissons. Ils se rendent ainsi service mutuellement : les industries financent, participent aux actions environnementales. Mais, leurs produits destructeurs dont on ne peut plus se passer, ne sont pas proscrits par les mesures de protection des ressources de la mer. Ces donneurs de leçon semblent bien parvenus aux pêcheurs qui, de leurs ancêtres, vouent un amour si poétique à la mer.

Alors, à qui la faute ?…

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